
Je me rappelle parfaitement de cette journée, du temps qu'il faisait, de ma tenue..
J'aime quand les choses se passent comme elles ont été pensés. J'ai pris le temps de réfléchir à l'accouchement que je voulais, l'endroit dans lequel je voulais accoucher. Je sais que plus d'une personne s'en contrefiche, mais pas moi.
Depuis le début, je me dis qu'à l'accouchement, je vais morfler. C'est simple, quand je pense accouchement, je pense à une femme sur une table qui hurle à la mort et qui fait écrabouille la main de son ou sa partenaire. Voilà l'image à laquelle j'associe l'accouchement.
J'ai finalement décidé, assez rapidement, de réaliser un accouchement dit physiologique et avec une sorte de pompe que je pourrais régler pour gérer ma "dose" de péridurale, je voulais être actrice de mon accouchement et pas spectatrice. J'ai lu énormément à ce sujet, je voulais être préparé, tout connaître. J'étais préparée à tout sauf à une césarienne.
J'ai tout lu, tout regardé sur l'accouchement, mais je ne me suis renseigné sur rien à propos de la césarienne. Je n'en voulais pas alors je ne voyais pas l'intérêt de m'y intéresser, même aux séances de préparation à la naissance, le cours sur la césarienne, je n'en ai pas voulu. C'était plus par superstition, je me suis dit que moins j'y portais attention moins, ce serait susceptible de me toucher. Raté. Superstition de mes deux oui. Je n'ai pas échappé à la césa.
. J'avais tout essayé, les positions, l'ostéo, etc… Rien a marché. Pas de place. Elle n'avait pas de place pour se retourner.
On dit que le corps est bien fait, qu'il se prépare à la naissance, le bébé prend naturellement la position blablabla. Que dalle. Que du chiqué.
Elle avait une position de confort ce que l'on appelle, c'est-à-dire qu'elle est restée tellement dans cette position, qu'elle lui convenait. Elle était restée longtemps dans cette position, car elle ne pouvait pas se mettre différemment fautes de place.
Le temps est maussade, je suis congelée, j'ai froid, car le stress me fait transpirer dans ma robe blanche. Le médecin vérifie aujourd'hui si bébé s'est retournée. Toujours pas, je le sais, il sait que je dois m'en douter, mais il va quand même me poser la question. Je sais qu'elle ne s'est pas retournée je sais où se trouve sa tête, ses pieds… Mais je ne lui dis pas. Je ne veux pas voir la vérité en face. Je lui dis que oui sûrement et que je l'ai senti se retourner hier. Mensonge. De toute façon, il va vérifier. Dommage.
Il voit qu'elle est toujours en siège décomplété, qu'elle n'a pas beaucoup de liquide amniotique et que la VME, la manœuvre pour la retourner manuellement n'est donc pas possible. Je dois réaliser une radiopelvimétrie. Cela consiste à voir si mon bassin est suffisamment large pour laisser passer le bébé le jour j.
Quand je prends du poids, je le prends dans les hanches, je me dis qu'elles sont suffisamment larges ! Je n'ai appris qu'après que ça n'a rien à voir. On peut avoir des os larges, mais un bassin tout petit.
Je passe cet examen, j'ai la radio dans l'heure et je dois retourner le voir. Une fois que j'ai les résultats dans mes mains, je regarde, mais n'y comprend rien. Pour moi, c'est ok.
Mon médecin prend les résultats et… Il part. Ok. Lorsqu'il revient il me dit qu'il va falloir accoucher par césarienne, mon bassin est trop petit. Il attend une réaction de ma part, je n'en ai pas. Il m'explique alors le scan, il m'explique un tas de choses dont j'en ai oublié la moitié, car à ce moment-là je ne l'écoutais plus vraiment.
Je ne pensais qu'à ce mot : césarienne.
Je ne pouvais pas lui répondre, je ne pouvais pas lui dire ce que j'avais sur le cœur, toutes les questions que j'avais à l'instant T, par exemple pourquoi ? N'y a-t-il pas d'autres solutions ? Comment ça va se dérouler exactement ? Je ne me suis pas préparée, je ne veux pas … Je n'ai rien pu dire. J'allais tout simplement pleurer toutes les larmes de mon corps si je disais un seul mot. Je me suis juste contenté de dire ok avec un sourire. Il a regardé l'autre sage-femme présente avec lui, ils ont discuté, comme si je n'étais pas là, de la date à laquelle ils sortiraient mon bébé de mon ventre.
Le jeudi c'est férié, trop contraignant, ils allaient choisir le mercredi. C'est bon pour vous ? Me dit-il. Ok.
Je dois me faire tester le jour d'avant pour être sûre de ne pas avoir le covid, mon compagnon également pour savoir s'il pourra être avec moi. On dormira sur place le jour d'avant pour être déjà dispo le jour j lorsque ce sera possible.
Mon monde s'écroule.
Moi qui rêvais d'un accouchement où c'est la surprise, où l'on court partout, j'avais désormais un accouchement planifié au jour prés. Selon leur besoin à eux. C'était mon corps, mon bébé et je ne pouvais décider de rien.
Subir juste subir une opération, j'avais l'impression de revenir des années en arrière où la femme n'a aucune liberté de choix.
Je suis partie, je suis montée dans l'ascenseur, sortie de l'hôpital, marché jusqu'à ma voiture, démarré mis une musique triste et j'ai craqué.
J'ai détesté ce jour.
Pourquoi me faire ça ? Pourquoi changer tous mes plans, au dernier moment, une cicatrice à vie me rappellerai ma césarienne … Pourquoi me faisait-elle ça ? Elle avait juste à se tourner. Je m'en veux, mais à ce moment-là je l'ai détesté. Plus que tout j'étais en colère contre elle et contre le monde entier. Moi qui me considère comme une personne plutôt sympathique, respectueuse des autres, pourquoi m'infligeait-on cela ? Pourquoi mon bébé m'infligeait cela ? Je ne lui avais pas démontré assez d'attention durant la grossesse et elle décidait de me le faire payer ? Mon ventre est un des seuls endroits de mon corps que je préfère et j'y verrai désormais une cicatrice qui me rappellerai la césarienne.
Qu'allait t-on me dire ? Que je n'accouche pas comme tout le monde, que ce n'est pas un vrai accouchement, qu'allait penser mon conjoint ? Que je ne suis pas à la hauteur pour accoucher normalement ?
J'ai détesté ce jour.
Je ne voulais plus accoucher.
Voilà ma réaction, voilà la violence de ma réaction, j'étais seule dans la voiture avec mes émotions, car je n'avais rien voulu laisser paraître devant le médecin. Pourquoi ? Je n'en sais rien encore aujourd'hui.
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